rien du monde

Qu’il soit facticement, cela peut bien être retiré en son pourquoi, mais le « Que » luimême n’est pas moins ouvert au Dasein. L’être-jeté de l’étant appartient à l’ouverture du « Là » et se dévoile constamment dans ce qui est à chaque fois son affection. Celle-ci transporte le Dasein plus ou moins expressément et authentiquement devant son « qu’il est et, en tant que l’étant qu’il est, il a à être en pouvant-être ». Toutefois, le plus souvent, la tonalité referme l’être-jeté. Le Dasein fuit devant celui-ci dans la facilité de la prétendue liberté du On-même. Cette fuite a été caractérisée comme fuite devant l’étrang(èr)eté qui détermine fondamentalement l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) en son isolement. L’étrang(èr)eté se dévoile proprement dans l’affection fondamentale de l’angoisse, et, en tant que l’ouverture la plus élémentaire du Dasein jeté, elle place son être-au-monde (In-der-Welt-sein) devant le rien du monde, rien devant lequel il s’angoisse dans l’angoisse pour le pouvoir-être le plus propre. Qu’en serait-il donc, si le Dasein tel qu’il se trouve (est affecté) au fond de son étrang(èr)eté était l’appelant de l’appel de la conscience (Gewissen) ? EtreTemps57

L’appelant n’est « mondainement » déterminable par rien en son qui. Il est le Dasein en son étrang(èr)eté, il est l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) originellement jeté en tant qu’hors-de-chez-lui, il est (277) le « que » nu dans le rien du monde. L’appelant est non-familier au On-même quotidien (alltäglich) – quelque chose comme une voix étrangère. Et qu’est-ce qui pourrait être plus étranger au On, perdu qu’il est dans la diversité du « monde » de sa préoccupation (Besorgen), que le Soi-même isolé sur soi dans l’étrang(èr)eté, jeté dans le rien ? « Ça » appelle, et pourtant cela ne donne rien à entendre à l’oreille préoccupée et curieuse qui puisse après coup être répété et publiquement commenté. Et en effet, que pourrait bien relater le Dasein à partir de l’étrang(èr)eté de son être jeté ? Que lui reste-t-il d’autre que le pouvoir-être de lui-même, dévoilé dans l’angoisse ? Comment pourrait-il appeler autrement qu’en une con-vocation (Aufruf) à ce pouvoir-être dont il y va uniquement pour lui ? EtreTemps57

Mais comment la temporalité de l’angoisse se rapporte-t-elle à celle de la peur ? Nous avons appelé l’angoisse une affection fondamentale (NA: Cf. supra, §40 (EtreTemps40), p. (184) sq.). Elle transporte le Dasein devant son être-jeté le plus propre et dévoile l’étrang(èr)eté de l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) quotidienne (alltäglich)ment familiarisé. Cela dit, l’angoisse est formellement déterminée, tout comme la peur, par un devant-quoi du s’angoisser et par un pour-quoi. Néanmoins, l’analyse a montré que ces deux (343) phénomènes coïncident dans l’angoisse. Ce qui ne doit pas signifier que les caractères structurels du devant-quoi et du pour-quoi seraient confondus, comme si l’angoisse ne s’angoissait ni devant…, ni pour… Que le devant-quoi et le pour-quoi coïncident, cela veut dire que l’étant qui les remplit est le même, à savoir le Dasein. En particulier, le devant-quoi de l’angoisse ne fait pas encontre comme un sujet déterminé de préoccupation (Besorgen), la menace ne vient pas de l’étant à-portée-de-la-main et sous-la-main, mais bien plutôt justement de ce que tout étant à-portée-de- et sous-la-main ne nous « dit » absolument plus rien. Avec l’étant du monde ambiant, il ne retourne plus de rien. Le monde où j’existe a sombré dans la non-significativité (Bedeutsamkeit), et le monde ainsi ouvert ne peut libérer de l’étant que sous la figure de la non-tournure (Bewandtnis). Le rien du monde, devant lequel l’angoisse s’angoisse, ne signifie pas que soit expérimentée dans l’angoisse (par exemple) une absence du sous-la-main intramondain. Celui-ci, au contraire, doit justement faire encontre (begegnen) pour qu’il ne puisse même pas retourner de… avec lui et qu’il puisse se montrer dans un vide impitoyable. Or cela implique que le s’attendre préoccupé ne trouve rien à partir de quoi il pourrait se comprendre, qu’il mord sur le rien du monde ; toutefois, le comprendre, butant sur le monde, est transporté par l’angoisse vers l’être-au-monde (In-der-Welt-sein) comme tel, ce devant-quoi de l’angoisse étant cependant en même temps son pour-quoi. Le s’angoisser devant… n’a ni le caractère d’une attente ni en général celui d’un s’attendre à… Le devant-quoi de l’angoisse est bel et bien déjà « là », étant le Dasein lui-même. Mais alors, l’angoisse n’est-elle pas constituée par un avenir ? Assurément, mais non pas par l’avenir inauthentique du s’attendre à… EtreTemps68